Renforcer l’attractivité du ferroviaire
- En garantissant la sécurité la santé et l’hygiène à bord et aux abords du train
Les passagers reviendront-ils dans les trains après la crise ? Inimaginable il y a un an, la question se pose pourtant aujourd’hui à tous les acteurs du secteur. Bien sûr, le ferroviaire dispose d’indéniables atouts environnementaux, pratiques, et économiques pour pouvoir imaginer que nos enfants et petits-enfants goûteront toujours au plaisir des voyages en train dans les prochaines décennies. Pour autant, la reprise du trafic en 2021 reste encore assez floue et les experts du secteur parient sur une baisse de l’usage des transports en commun dans les mois à venir, si ce n ‘est à plus long terme pour la clientèle d’affaire en télétravail dont on estime la baisse de -5 à -10% en volume. Comment limiter un tel phénomène qui risque de représenter un sérieux manque à gagner pour toute la filière et simultanément restaurer l’image du transport en commun actuellement désigné à tort comme bouc émissaire de la contamination? L’enjeu prioritaire sera de relever le niveau de sécurité sanitaire. Dans un monde traumatisé par la COVID-19, les opérateurs devront proposer aux voyageurs de nouvelles garanties, et valoriser leurs offres, par exemple en mettant en avant des solutions de filtration de l’air, en incitant et facilitant le respect de nouvelles mesures d’hygiène à bord ou en reconcevant les espaces dans leurs voitures pour une distanciation confortable entre passagers. L’équation économique restera cependant à résoudre, car moins de passagers au m2, induit un surcoût : les acteurs de la chaîne de valeur devront être imaginatifs.
- En améliorant le confort des passagers et la connectivité
Un autre élément fondamental est la qualité perçue par le passager. Si les opérateurs souhaitent attirer la clientèle vers le train, ils devront redoubler d’ingéniosité pour rendre les trains encore plus confortables et à l’image de l’avion ou de la voiture, faire en sorte que les passagers ressentent un « bien-être », de leur entrée en gare à leur installation à bord du train (matériaux, agencement, prises électriques…). Créer une « expérience client unique », différenciante et séduisante est l’objectif. Cette opération de reconquête de la clientèle concernera également les voyageurs d’affaires, le segment rentable de la période d’avant COVID. Cette cible s’est largement convertie au travail à distance ces derniers mois et devrait certainement continuer de limiter ses trajets qu’il s’agisse de déplacements du quotidien (bureau, réunion…) ou plus ponctuels (salons…). Pour redonner envie de voyager à ces professionnels, le secteur du ferroviaire devra proposer à bord un nouveau confort de travail, similaire à celui du bureau ou de la maison, ce qui passe bien entendu par un accès parfait au réseau internet, avec des débits toujours plus importants pour un échange fluide de vidéos, de données et de voix, grâce notamment à l’implantation de la 5G. Si les opérateurs souhaitent ré-attirer la clientèle vers le train, que ce soit pour des trajets courts, régionaux, intercités ou long à l’international, en concurrence avec l’avion, la 5G est un passage obligé. En train comme en métro, les voyageurs ont aujourd’hui besoin d’être connectés en permanence, sans interruption.
2) Digitaliser les transports ferroviaires
- Pour augmenter la capacité des lignes
Seul l’accroissement de la capacité des « transports de masse » pourra répondre sur le long terme à l’urbanisation croissante et à la congestion routière qui en résulte.
Or, pour accroître ces capacités sur des lignes ferroviaires existantes ou nouvelles, une des solutions est d’augmenter la fréquence des trains. Pour cela, la digitalisation est un savoir-faire clé : elle permet de laisser le train calculer et optimiser sa propre distance d’arrêt d’urgence par rapport à celui qui le précède. La distance entre trains successifs s’en trouve alors réduite en toute sécurité pour les passagers, et l’utilisation et la capacité de la ligne augmentée.
À titre d’exemple l’Europe est en train d’harmoniser sa signalisation ferroviaire avec l’ERTMS (European Railways Traffic Management System), qui s’appuie sur les technologies digitales, avec l’ambition de favoriser non seulement l’interopérabilité entre pays, mais aussi d’en augmenter la capacité de transport, à l’échelle régionale nationale et internationale en augmentant le nombre de trains par heure.
S’ajoutent à cela les initiatives comme celle de la SNCF et d’autres opérateurs de tester les modes de conduites semi-automatiques à automatiques, en s’affranchissant des modes manuels (Grade of Automations : GoA 3 et 4)
En milieu urbain, même tendance : au lieu de voir passer par exemple un métro toute les 3 minutes sur la même ligne, la cadence passe à un métro toute les 2 minutes, voire moins. L’automatisation s’impose alors, car le mode manuel ne permet pas ces fréquences.
La ligne 14 du métro parisien en est un exemple.
Il est évident qu’à terme l’automatisation des trains en augmente la disponibilité et en réduit les coûts opérationnels, même si toutefois les investissements sont conséquents et doivent être amortis sur de longues périodes.
- Pour améliorer la disponibilité des trains tout en baissant les coûts
La disponibilité des trains est étroitement liée à la fiabilité de leurs composants et à la « santé » au jour le jour de leurs organes (freins, …). Aujourd’hui, grâce à l’évolution des capteurs embarqués et de l’Internet of Things, il est possible d’obtenir des diagnostics en temps réel de l’état de santé du train, d’en prédire les défaillances, et donc d’organiser une maintenance préventive économique, plutôt de d’opérer une maintenance corrective plus coûteuse, voire de gérer un arrêt en ligne.
La modélisation devient aussi prépondérante pour anticiper, prévoir, définir les conduites à tenir lors du cycle de vie du train : on parle de jumeaux numériques du train physique, que l’on peut soumettre à des scénarios opérationnels, sans engager des essais physiques. C’est aussi un axe notable de réduction de coûts, avec des méthodologies déjà à l’œuvre dans le secteur automobile.
La disponibilité des trains dépend aussi de la disponibilité des pièces de rechange. Ici, la technologie de l’impression 3D a un rôle important à jouer, dans le cas de la rupture de chaîne d’approvisionnement, ou de mise en œuvre ou de livraison incompatibles avec des temps d’intervention courts.
Enfin le Digital avec « l’usine 4.0 » inspire les rénovations et constructions d’atelier de Maintenance performants et modernes, dans le cadre d’une concurrence accrue liée à la libéralisation du secteur, en cours ou à venir selon les pays : la robotisation d’opérations de maintenance est à l’étude, promue et financée par des programmes européens. Le coût d’exploitation d’un train étant à 40% lié à sa maintenance durant les 35 ans de la durée de vie du matériel, on comprend aisément l’apport économique du digital.
3) Concevoir des trains toujours plus vertueux
La pandémie a conforté la conviction des politiques que le mode de transport ferroviaire pour les passagers autant que pour les marchandises reste celui qui est au regard du volume transporté par unité de temps l’un des plus écologiques et respectueux pour la planète. En effet, au moins trois fois moins polluant que la route, le ferroviaire peut déjà revendiquer sa place en haut du classement des modes de transports les plus responsables, que ce soit pour le transport de personnes ou de marchandises. Cela dit, la filière doit poursuivre ses efforts pour améliorer encore l’empreinte environnementale sur l’ensemble du cycle de vie du matériel roulant et des infrastructures qui le supportent à un coût acceptable pour la société. Quelles sont les pistes actuelles de l’industrie ferroviaire pour verdir les flottes ? Notons d’abord le développement de nouveaux modes de stockage d’énergie électrique permettant de réduire la consommation de combustible diesel, notamment sur les portions de voies non électrifiées. Depuis 10 ans, grâce notamment à l’essor de l’e-mobilité dans les secteurs comme l’automobile ou le poids lourds, la performance des batteries a significativement progressé en puissance et en rendement.
Ensuite de nouveaux combustibles ayant une empreinte carbone prometteuse par rapport aux énergies fossiles, sont passés de l’expérimentation à la commercialisation, à l’instar du train à Hydrogène i Lint du constructeur Alstom, ou des prototypes fonctionnant au gaz naturel liquéfié en cours d’essai en Espagne. D’autres constructeurs suivent.
Les piles à combustible Hydrogène, comme source d’électricité à bord et ne rejetant que de l’eau comme résidu, bénéficient d’une grande visibilité médiatique et d’un important investissement de la part des industriels ferroviaires. Au niveau européen, des pays comme la France et l’Allemagne ont ainsi dégagé des budgets de plusieurs milliards d’euros pour accompagner le développement de la filière de l’hydrogène. Un enthousiasme prometteur mais qu’il reste à transformer en solutions viables économiquement et cohérentes techniquement. Sachant que la mise en œuvre du combustible hydrogène dans le secteur ferroviaire, ne se limitera pas à la seule intégration d’un nouveau mode de propulsion à bord des nouveaux trains, ou à la seule rénovation des flottes existantes, le secteur ferroviaire doit aussi penser de façon systémique le déploiement des filières de production et d’approvisionnement en hydrogène adaptées à ses besoins. Il doit le faire en coordination avec d’autres secteurs d’industries, plus demandeurs, afin d’en abaisser et d’en partager les coûts. D’ailleurs, même si cette énergie potentiellement plus « propre » semble avoir aujourd’hui la faveur des élus, des ingénieurs et des médias, il convient de ne pas négliger les autres pistes permettant d’en finir avec le diesel. D’où l’intérêt d’une approche systémique, à laquelle SEGULA souscrit entièrement pour être « moteur » dans la réduction de l’empreinte CO2 du secteur ferroviaire.
Verbatim
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« Le secteur du ferroviaire doit profiter de cette période pour imposer l’idée que le train est le mode de transport durable de demain. L’heure est à la mobilisation. Toute la filière doit désormais parler d’une même voix. »